Dans un arrêt du 14 novembre 2012 [1], la chambre sociale de la Cour de cassation a pu estimer que l’accord du salarié est nécessaire lorsque la modification des horaires de travail réalisée par l’employeur se traduit par une réorganisation complète de la répartition et du rythme de travail.

En l’espèce, une salariée embauchée en tant que sage-femme dans un hôpital parisien effectuait quatre gardes de 24h par mois. Son employeur décide cependant, sans la consulter, que désormais, elle effectuera huit gardes de douze heures, en alternant le jour et la nuit.

Face à quoi, l’employée prend acte de la rupture de son contrat de travail et saisit le Conseil des Prud’hommes afin que cette demande soit qualifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse pour ainsi obtenir les indemnités échues dans pareil cas. Au soutien de sa requête, la salariée dénonçait les effets néfastes de ce changement sur sa vie personnelle et familiale. En effet, cette nouvelle organisation lui imposait des trajets supplémentaires et l’obligeait à adapter le système de garde de ses trois enfants.

Rappelons qu’en termes de prise d’acte de la rupture du contrat de travail, deux solutions sont possibles à l’issue de la procédure judiciaire :

Soit le juge estime que le manquement de l’employeur à l’égard du salarié est suffisamment grave. Dans ce cas, tout salarié justifiant de deux ans d’ancienneté et travaillant dans une entreprise de plus de 10 salariés pourra prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au moins égale à 6 mois de salaire, à laquelle s’ajouteront une indemnité de licenciement, une indemnité compensatrice de congés payés et l’indemnité compensatrice de préavis.

Soit le juge estime au contraire que les faits invoqués ne justifient pas une prise d’acte, ici la rupture sera assimilée à une démission. Si le salarié peut prétendre à une indemnité compensatrice de congés payés, il ne pourra néanmoins prétendre aux allocations chômage et sera redevable à l’égard de l’employeur d’une indemnité compensatrice de préavis.

L’intérêt à soulever dans cet arrêt est qu’en principe, le droit distingue selon qu’il s’agit d’une modification d’un élément essentiel du contrat de travail ou d’une modification des conditions de travail et de l’exécution du contrat. Dans le premier cas, la jurisprudence qualifie comme essentiel (entre autre) le montant de la rémunération contractuelle, le temps de travail ou encore la qualification professionnelle. Une modification intempestive de ces éléments suffit alors à justifier une prise d’acte de la part du salarié. La modification des horaires de travail quant à elle appartient à la seconde catégorie. En principe ici, le salarié n’a pas son mot à dire puisqu’un changement des conditions de travail relève du pouvoir de direction de l’employeur. En cas de refus répété du salarié, l’employeur pourra à ce titre procéder à son licenciement.

Dans l’affaire qui nous intéresse était en cause l’organisation du temps de travail. Il ne s’agissait donc pas d’une atteinte portée au temps de travail de la salariée pouvant nécessiter sa consultation préalable.
Néanmoins, la Cour de cassation retient que cette modification s’apparentait à une modification du contrat de travail telle qu’elle supposait que l’employeur requiert au préalable l’agrément de la salariée concernée.

[1Soc., 14 novembre 2012 ,n°11-21.240